Je dois effectuer demain un
examen médical pas rigolo, rigolo, mais auquel je me soumets tous les cinq ans
en raison d’une hérédité chargée dans la sphère considérée. C’est déjà la
quatrième fois que j’y procède, je me souviens, la première fois ce genre
d’examen se faisait sans anesthésie générale et je frémis encore à revoir s’approcher
et entrer en moi les tuyaux exploratoires. L’anesthésie générale est donc
bienvenue même si on ne peut s’empêcher de la craindre.
Ce qui est curieux c’est la
façon dont ce genre de moments et les émotions qui leur sont associées
s’impriment en nous au-delà des mots. Le moment revient tel qu’en lui-même.
Pendant notre séjour dans le midi j’étais occupé d’autre chose et n’y pensais
guère mais là maintenant que je suis à l’approche, que j’ai commencé le régime
drastique qui doit précéder l’examen, que j’ai acheté les sachets de l’immonde
produit qu’il va me falloir ingurgiter par litres pour me nettoyer (quasiment le
supplice de l’entonnoir, bon, bon, j’exagère un peu !) me reviennent exactement
les mêmes sensations que la fois précédente, la même impression de journées
entre parenthèse où l’on fait ce que l’on a à faire mais avec, comme en
surplomb, cette ombre du moment à venir et de ce qui pourrait éventuellement en
résulter, le même cortège d’imaginations maléfiques et de projections qui se
nourrissent les uns des autres et dont il est difficile de se détourner.
Difficile de croire que
c’était il y a cinq ans tant le moment revient avec force, comme si c’était d’hier.
Et pourtant il en est bien ainsi. C’est la multiplication de ces bouts de passé
cristallisés, à la présence aiguë, sans la sensation d’une épaisseur temporelle
qui l’éloignerait de nous, qui donne je crois ce sentiment, apparemment si
unanimement partagé, d’accélération du temps à mesure que l’on vieillit. Il s’accélère
justement quand on voudrait qu’il ralentisse. C’est mal fichu ça dans la bête
humaine ! Et là, n’étant pas à un paradoxe près, j’ai bien hâte d’en être
à demain après-midi !
Pour parler d’autre chose
j’ai vu vendredi soir « Like someone in love ». J’ai beaucoup aimé. J’aime
inégalement Kiarostami. J’avais adoré « Où est la maison de mon ami ?»,
c’était ma découverte de ce grand cinéaste, m’était un peu trop ennuyé avec « Le
goût de la cerise » ou « Le vent nous emportera », j’avais finalement
beaucoup aimé « Copie conforme » malgré une première demi heure plus
que laborieuse et un dispositif un peu trop sophistiqué. Aucun de ces défauts
ici. Le scénario est d’une grande simplicité, la mise en scène et la mise en
images, toujours brillante chez Kiarostami, est particulièrement fluide, les
dialogues passent bien, les acteurs, sans avoir besoin d’en faire trop, sont
remarquables (mention spéciale au vieil homme). C’est un film épuré, dégraissé,
sans aucune fioriture qui détournerait de l’essentiel, les rapports des personnages
et leur évolution au cours des 24 heures du récit, le vieil homme et sa tendresse
mélancolique et impuissante, la jeune femme perdue et triste, les amours
possibles et impossibles, fruits du hasard mais aussi profondément marqués par
les écarts sociaux et d’âge entre les personnages. Le film me parait à la fois
très japonais (les réactions des personnages, une sorte de fatalisme) et très
iranien (en quoi, je ne sais pas trop, une impression que je retire de beaucoup
de films iraniens vus, au-delà du style spécifique de Kiarostami). Du coup peut-être
cela lui confère-t-il une sorte d’universalisme qui rajoute à sa force et que
ne peuvent avoir par exemple nos braves comédies dramatiques à la française pas
plus que de bons films hollywoodiens.
Oh! Oh! Je vois de quoi tu parles o;) l'immonde produit, en effet! Bernard (mon Bernard) m'a fait quelques dessins pour m'encourager quand je l'ai passé, en janvier ! J'avais un entonnoir, en effet o;) (sur les dessins, s'entend!) Avec l'anesthésie, ça passe tout seul o;) et l'anesthésie, c'est très gai, perso, j'adore ça, et l'avantage là, c'est que le réveil n'est pas du tout douloureux. Ah! Si je pouvais dormir! Dormir sans mourir, là est le paradoxe... Dormir à volonté! Du 1er novembre au 20 mars par exemple. Ou jusqu'à Pâques. Mais bon, c'est pas possible, alors, continuons !
RépondreSupprimerj'ai eu aussi l'immonde produit à ingurgiter !
RépondreSupprimerceci étant, je préfère ingurgiter des bobines de films, elles passent toutes seules elles :)
Ah ! l'effroyable solitude devant la maladie.
RépondreSupprimerD'accord avec vous concernant Kiarostami. Il y a, au début du film, une séance d'une dizaine de minutes durant laquelle Tokyo est filmé à travers les vitres d'un taxi. C'est d'une beauté à couper le souffle et c'est un grand moment de cinéma.
Carmilla