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jeudi 15 août 2013

Paris, 15 août



Je n’ai que rarement eu l’occasion d’être à Paris au mois d’août et jamais peut-être à la mi-temps du mois. Je suis frappé par l’extraordinaire calme de la ville, les rues m’y paraissent presque vides, aussi bien de piétons que de voitures, le périphérique lui-même hier à la mi-journée ne déroulait qu’un flot très espacé de véhicules, la rumeur de la ville est assourdie…

D. est repartie quelques jours en banlieue chez sa mère, je mène un petit train tranquille, je me promène beaucoup, marche le nez au vent,  je n’ai pas tant que ça envie de me précipiter dans les salles obscures ou dans des expositions, et d’ailleurs il n’y a pas grand-chose de très affriolant au programme. J’ai vu deux films quand même, Gold de Thomas Arslan, pas mal mais une progression un peu téléphonée et Je ne suis pas mort de Medhi Ben Attia, très décevant. Il ne fait pas trop chaud, ce qui est agréable pour la promenade, mais, rien à faire, même sans canicule, même avec une circulation allégée, Paris pue, surtout l’après-midi.

Mes pas m’ont mené plutôt dans des lieux déjà connus, dans mon quartier élargi plutôt qu’à l’autre bout de la capitale. Je note les changements. Il y a de ci de là pas mal de nouveaux pochoirs de MissTic, quelques jolis murs peints qui n’y étaient pas. Dans une petite rue derrière la Manufacture des Gobelins un terrain vague qui avait longtemps résisté et que j’ai photographié à plusieurs reprises a disparu, il s’y est construit un important bâtiment qui abritera crèche et centre de PMI. Nécessaire sûrement mais la disparition des rares espaces à l’abandon qui persistaient dans Paris est toujours un peu triste. D’autant que le bâtiment, du moins en l’état (il n’est pas tout à fait terminé) me parait peu réussi : de gros cubes un peu écrasants, qui ne ménagent pas de respiration, et qui étouffent la rue très étroite dans lequel ils sont construits. Je suis resté assez longuement dans le jardin public proche à lire, mi-ombre, mi-soleil. Le parc aussi était très vide, pas de jogger ou de taïchiste comme à l’habitude, quelques mamies, quelques jeunes enfants dans l’espace jeux, mais si peu par rapport à l’habitude. Je me suis souvenu être venu ici bien des fois avec mes propres enfants petits, il y a quoi, vingt, vingt-cinq ans ! Puis m’est remontée une autre image oubliée, ancienne aussi quoique plus récente, je n’étais plus avec les enfants, c’était un début d’été, fin juin sans doute, il faisait extrêmement chaud, je passais en solitaire dans ce jardin et m’y était assis à l’ombre pour lire mon journal. Une jeune femme très belle était arrivée avec un petit garçon. Elle portait une robe légère extraordinairement courte. Elle a accompagné l’enfant sur l’aire de jeu, l’aidant à grimper sur un toboggan, contrôlant ses descentes, se penchant vers lui quand il jouait dans le sable, totalement insoucieuse (ou, qui sait, très consciente) de ce qu’elle révélait de son anatomie à chacun de ses mouvements. Je me suis déplacé,  Cédant à ma vieille pulsion voyeuriste, j’ai changé de banc pour mieux être au spectacle, ne jetant plus que des coups d’œil distendus sur mon journal pour donner le change. Elle était restée un long moment puis était repartie, donnant la main à l’enfant et je l’avais suivi des yeux jusqu’à ce qu’elle s’efface. Quelque temps plus tard j’avais, partant de cette image et lui imaginant une suite, écrit une jolie petite nouvelle érotique.

Est-ce cette évocation ? En rentrant, j’ai eu envie d’écrire. J’ai repensé à un scénario imaginé il y a pas mal de temps déjà. Une nouvelle est venue assez facilement. Je me suis fait plaisir à l’écrire. Comme chaque fois que je me risque à la fiction, j’ai été surpris de ce qui sortait, de la façon dont les mots en entraînent d’autres et nous conduisent un peu ailleurs, un peu plus loin que là où on passait aller d’abord. C’est ça le plaisir de la fiction, ces surgissements que l’on n’attendait pas, ces surprises que l’on se fait à soi-même. En l’occurrence ici, c’est au milieu de l’histoire inventée, une bribe d’un souvenir qui s’est imposée et qui s’est tressée dans le récit. Je  me suis rendu compte en enregistrant ma petite nouvelle avec les autres, que je n’en avais pas écrit depuis 2010. J’avais tort. Je me régale quand je prends le temps de m’y mettre. Et ça relance de façon générale la machine à écrire puisque, à peine avais-je terminé, que j’ai eu envie d’écrire ce petit billet.

Peut-être est-ce aussi ce moment de latence parisienne, cette solitude paisible, qui a favorisé cette envie d’écrire. Tout à l’heure, D. revient de banlieue et ce soir nous avons fils ainé à dîner, entre nos voyages et les siens, cela fait plus de deux mois qu’on ne l’a pas vu, c’est un plaisir aussi de telles retrouvailles…




5 commentaires:

  1. hello Bernard!
    Que tu te sois remis avec plaisir à l'écriture me remplit de joie...
    Vas-tu nous donner l'occasion de lire cette nouvelle? ;-))

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  2. Suite de Coum: Si oui... si l'envie te titille, si tu as besoin de consignes de base, viens nous rejoindre sur Kaléïdoplumes, je serai si contente de t'avoir avec nous :o)

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  3. Alors ?
    La publication de ce recueil de nouvelles ?
    C'est pour quand ?
    Ça sert à quoi d'écrire pour le garder au fond de son ordinateur ? hein ? hein ?
    (cette dernière phrase reprend en substance tes propres propos d'il y a peu....)

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  4. Ravie de voir que tu te (re)mets à l'écriture... à la fiction... et je ne peux que rejoindre AlainX dans sa question !!!

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  5. Je profite d'une brève connexion bretonne pour vous faire un coucou à tous.
    Une autre nouvelle est en cours.
    Publier? qui sait, maintenant que c'est devenu très facile et que chacun peut s'autopublier, peut-être y viendrais-je...
    Cassy, merci de ta proposition, mais je ne suis pas spécialement en manque de consignes, en fait j'ai quelques vieilles idées dans mes tiroirs mentaux, faut juste que je m'y mette...

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