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samedi 7 décembre 2013

Paris, d'H-J.D. à Salgado



Je ne voudrais pas encore une fois faire ma litanie sur le temps qui passe si vite, sur toutes ces choses que je voudrais évoquer dans mon blog et que je ne fais pas et pourtant…

Paris depuis plus d’une semaine déjà ! Paris tourbillon comme toujours, amis, familles, choses diverses à régler tant à l’égard des anciens, la mère de D., mon père, qu’avec nos deux fils auxquels nous cherchons à donner des coups de main pour leur installation dans une phase nouvelle de leur vie. Les allées et retours en métro, ces odeurs et cette promiscuité qui maintenant me pèsent comme ces pauvres gens qui font la manche, pas un trajet sans un voire deux quémandeurs, auxquels je donne la pièce ou pas, selon l’impulsion du moment mais dont la présence, de toute façon, me met mal à l’aise. Activités pour l’APA, mardi toute la journée un stage pour apprendre à quelques uns de nos adhérents à utiliser Publisher afin d’élargir le cercle de ceux qui peuvent contribuer à la réalisation de nos productions, et surtout, samedi dernier, cette journée de présentation du diariste Henri-Jacques Dupuy qui m’avait donné beaucoup de travail de préparation. Mais franchement je crois que ça a été réussi. Nous étions dans une petite salle où nous allions pour la première fois, qui sert pour des ateliers théâtre ou d’écriture, une salle chaleureuse avec des livres, des tentures, une estrade, une salle bien pleine, un peu bondée même (pour un même effectif c’est toujours mieux de se sentir serrés dans une petite salle que de se retrouver dispersés dans un vaste amphi), un public attentif et même plutôt réactif. J’ai eu l’impression que tant les présentations de ma « collègue » que les lectures d’extraits de textes que j’ai faites moi passaient bien. C’est un peu banal à dire mais j’avais vraiment l’impression qu’en lisant j’incarnais l’auteur au sens propre, que je le faisais un petit peu revivre, j’avais l’impression que Sylvette, sa fille qui a collationné le journal et l’a déposé à l’APA, le ressentais aussi ainsi et ça m’a fait un grand plaisir, comme d’entendre le fils de Sylvette dire que de m’avoir écouté, lui avait pour la première fois donné envie d’aller lire ce journal de son grand père. Je sais que je lis assez bien. J’ai toujours un grand plaisir à cette activité, il y a vraiment une jouissance à faire passer les mots imprimés, comme assoupis, endormis dans leur gangue de papier, à la vie que leur confère la voix et le souffle. Et j’ai plaisir aussi bien sûr au retour positif que les auditeurs me font. (découverte assez récente de ce plaisir, pas plus d’une dizaine années, c’était en prenant conscience en atelier d’écriture qu’après le plaisir d’avoir écrit il y avait l’encore plus grand plaisir de faire entendre au groupe ce qu’on avait écrit, souvenir de premiers ateliers d’écriture à l’APA puis ensuite d’un certain à l’abbaye d’Hurtebise au cours de week-end d’écriture animés par Coumarine). Bref plaisir toujours à faire des lectures mais là, il y avait peut-être un petit quelque chose en plus, le sentiment de contribuer à une transmission.

Avec tout ça je n’ai pas eu tellement de temps pour profiter de Paris. Un seul film jusqu’à présent (Inside Llewin Davis des frères Coen, pas mauvais mais sans plus, les Coen font du Coen) et une seule expo mais quelle expo ! Genesis du photographe Sébastiao Salgado à la Maison Européenne de la Photographie. Une merveille. Dès photos ramenées de huit années de voyage dans diverses contrées encore à l’écart de la civilisation moderne qui évoquent la terre originelle, montrent sa fragilité et sa stupéfiante beauté. Il y a des paysages absolument superbes mais pas seulement, il y aussi la faune, la flore et des hommes, ces derniers peuples qui occupent ces lieux. Salgado, plus que quiconque sait tirer des effets merveilleux de l’usage exclusif du noir et blanc. Magnifique lumière sous des ciels souvent tourmentés, ampleur et profondeur des paysages avec une intense présence des figures mises en avant, netteté des détails et des portraits sur les fonds plus évanescents. L’exposition est très importante, plus de deux cent cinquante photos, occupant les trois étages de la MEP. Les tirages, évidemment de magnifique qualité, sont en grand format. L’ensemble est très fort par ce qu’il dit et montre de notre terre mais beaucoup de ces photographies vous scotchent aussi par leur puissance esthétique individuelle. J’ai feuilleté les livres en sortant, me disant même que ce pourrait être une bonne idée cadeau pour mon père pour Noël. Mais évidemment la taille et la qualité des tirages n’ont rien à voir et l’on préfère rester sur l’impression forte que l’on vient d’avoir. Tant mieux d’une certaine façon. Cela justifie d’aller aux œuvres même, ça rappelle que c’est dans le moment seul de la visite que l’on est véritablement en présence et que c’est de cela qu’il faudra garder souvenir.
L’œuvre de Salgado est d’abord esthétique mais elle aussi un témoignage, attirant notre attention sur la nécessité de préserver la terre. Salgado joint d’ailleurs l’action à l’image. Il a créé une fondation l’Instituto Terra qui a fait revivre la forêt sur le site de la ferme familiale où il a vécu dans son enfance. Les images de la régénérescence de l’endroit sont impressionnantes et plus qu’encourageantes. Tout ça malheureusement pèse peu par rapport à la crise écologique généralisée que nous vivons. La seule autre exposition à la MEP en même temps que Salgado montre quelques images d’Alain Buu autour de la crise de l’eau en Inde, il y a des images hallucinantes sur la pollution du Gange ou sur la ville de Mumbaï, ça vous ramène à d’autres réalités qui hélas pèsent bien plus que les terres préservées qu’évoquent les images paradisiaques de Salgado.
Bien sûr j’ai lu l’article du Monde aussi sur le sponsoring douteux qu’apporte le groupe minier Vale aux entreprises de Salgado. Typique greenwashing. Ça attriste un peu mais bon, mieux vaut un peu de greenwashing que rien du tout et surtout ça ne remet en cause ni la portée du travail de Salgado ni, surtout, la somptuosité de ses images et le bonheur que l’on prend à les voir.
Cet après-midi Heimat sans doute, je vais essayer de voir les deux épisodes à la suite, demain encore un petit repas familial, lundi retour vers notre paisible province… 






4 commentaires:

  1. Je vais aller à Paris de mercredi midi à vendredi soir, et je compte bien voir l'exposition de Salgado. Je me souviens encore de l'expo "La main de l'homme", il y a 20 ans, du côté de Chaillot.
    Seras-tu encore à Paris ces jours-ci ?

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  2. Et non, je suis dans ma province. Bon séjour parisien.

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  3. Genesis est en effet un exposition stupéfiante. Je n'imaginais pas qu'on puisse obtenir des photos en noir et blanc aussi gorgées de substance, en quelque sorte...

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